On a reçu…

Dans sa vie elle avait eu tant de galères
Elle aurait pu en devenir très amère
Puis elle comprit que cet initial duel
était la cause de tout son fiel

elle a envie, elle rit, elle sait qu’elle va encore se tromper

D’abord maintenus dans la dépendance
par les obscurs liens de son enfance
elle a choisi de tenter sa chance
et sur cette mascarade mettre du sens

elle a envie, elle rit, elle sait qu’elle va encore se tromper

Elle essaye chaque jour d’avancer
vers une vie plus glamour
sans chou cabus ni tablier
et au matin elle recrée son amour

elle a envie, elle rit, elle sait qu’elle va encore se tromper

ça lui donne la force d’avancer
car elle à l’espoir de danser
sans oublis ni pardon
mais de ses souffrances elle fait l’abandon

elle a envie, elle rit, elle sait qu’elle va encore se tromper

S.T.

Ce texte a été écrit lors d’un atelier d’écriture pendant une journée contre les violences faites aux femmes.

On a reçu…

Je voudrais pleurer des larmes de sang
car je reste seule au milieu de cet océan…
mais il n’est pas blanc il est rouge
j’ai en moi trop de violence
elle a un goût de rance
car elle ne veut pas sortir
je voudrais réapprendre à rire
à courir et toutes les fenêtres fleuries.
Sachez braves gens qu’on voudrait m’enfermer
car pour la société
je suis un danger, si jamais je venais à exploser.
M’héberger à leurs frais ils sont prêts
mais pour ne pas sombrer je vais tout essayer,
il faut que j’arrive à m’exprimer
ne plus gêner les individualités
arriver à gérer mes tensions
et si un jour arrivait la révolution
j’aimerais que tout cela se passe sans moi,
que quelqu’un vienne me dire casse-toi.
Tout cela est dangereux pour toi.
T’inquiètes pas on y arrivera.
Si seulement je pouvais pleurer,
arriver à m’extérioriser.
Je suis peut-être folle, mais quelques fois je vole
et même que des fois je parle aux oiseaux
et je m’en vais très très haut.
Pourquoi j’ai l’impression de provoquer des choses
qui ne sont pas toujours roses.
C’est cette putain de religion
que je me suis créée et qui me tourne en rond,
dans ma tête.
Et c’est pas trop la fête.
Je sais pas ce qui me guette
mais ça me fait un peu peur.
Je voudrais pas tomber dans un trou de néant…

S.T.

La réponse pour les fous

« Je vénère les fous, c’est mon plaisir intime
Et dans l’antre des crimes, je les illusionnerai libres »

lapierreaucouIL FAUDRA RESTER FOU !
Devenus fou par de mauvaises raisons
Quelle chance d’être différents de ceux qui nous regardent mal
Provoquer la rupture et s’en faire une alliée
Il n’y a plus à respecter
Il faut rester fou
Devant le jugement de la réticence
Il faut rester fou et ouverts
A tous ceux qui causent notre remord
Il faut résister ouverts
Se prendre pour eux sans les comprendre
Les devenir pour les dépasser
IL FAUDRA RESTER FOU !

Quand partout pour tout vous dire *
Barré instable, inaccessible comme l’horizon d’aujourd’hui l’est
Je ne trouve que la folie pour répondre à mon attente
Quand la folie me craint comme je l’ai
Quand partout je l’aime tant elle me disperse

Quand partout pour dire encore *
Son lot de souffrances me purifiant d’un raisonnable trop ancré
Je lui appartiens
Quand partout les atmosphères mêmes la respirent
Mon cœur la désirant palpable

Quand partout *
Folie pure bien entendue, folie de mes origines
Y creuser encore, en prendre une poignée et filer avec
Quand partout la répandre en allant
Sentir l’éternité me vivre
Lui répondre fou
Elle me souhaitant de le rester

Et c’est ainsi et j’étourdis mes manières d’être pour une autre prophétique sincère…

Ah ! Mes fidèles, mes compagnons !
Accourons sur l’autel
Tels des poètes et jouissons !

Nos humeurs bipolaires nous ouvrent à d’autres horizons
Aller par-ci… Aller par-là… Allons-y vraiment !
Nos psychoses en étincelles métalliques et rayons du ouï-dire
Nos grands délires à régénérer en allant combattre les jugements du faux

Nous irons danser dans les cimetières
Et sur la tombe d’Œdipe
Nous ferons l’amour à en faire jouir la pudeur
A décomplexer la norme de ses pleins pouvoirs

Ah ! Mes fidèles, mes compagnons !
Que tout le monde danse !
Plaisir et résistance !

Et ceux pour qui la violence est trop grande
Vous aurez le choix des armes

Ne nous soucions plus de ces peurs que nos désirs vont transcender

Vouloir être seul, rester triste et vouloir mourir
Seront des vœux pleins de surprises
Quand nous ferons des prisons, des hp, des églises
Des ruines à les faire exaucer

Quant aux regards baissés, attentifs au désespoir
Répliques patientes du regard d’un dieu dans le ciel
Votre manque de confiance sera un plus pour mieux voir nos racines

Ah ! Mes fidèles, mes compagnons !

Repousser les limites au-delà du visible sera notre politique sécuritaire à nous
Car pour notre survie
Nous croyons en ce qui n’a pas été découvert

Nous verrons que nos pensées paranoïaques sont des vérités à venir
Qu’elles nous étonneront au point de nous voir de l’extérieur

Nos angoisses nous nourrissent d’un trop plein
Nous allons entendre, entre douleurs et dérisions
Ce à quoi ce cœur nous appelle

Nous irons digérer de nouvelles émotions
Surgissantes inédites, avouées, exaltées

Ah ! Mes fidèles, mes compagnons !

Nous ferons l’éducation à Dame Nature
Que lorsqu’elle nous aura appris ce qu’est vraiment la mort

Les mystères réapparus, les réhabiter ensemble et sans se cacher

Nous deviendrons ces épouvantails à têtes de clown
Et dans l’obscure et fondus au soleil
Nous en oublierons nos identités et pour nous reconnaître
Nous serons différents
Nous deviendrons les phares de l’absolu
Des miroirs déformants pour aller voir ailleurs

Ah ! Mes fidèles, mes compagnons !
Accourons sur l’autel
Jurons sur le destin de l’incompréhensible
Revenons idiots afin d’être nous-mêmes dans cet accord fatal
Accourons sur l’autel
Laissons faire un tourbillon de toutes les logiques
Accourons sur l’autel
Tels des poètes et jouissons !

T.

Rispéridone

Ce neuroleptique est prescrit pour la schizophrénie, mais également pour les problèmes de migraines, l’addiction au jeu, le bégaiement, la nausée, le trouble bipolaire.

risperidoneIl efface la tête. Supprime ses maux comme ses plaisirs. Efface les mots.
Il efface les souvenirs des méandres du cerveau.
Il replie les casinos, éteint leurs lumières, grille leurs néons, avale leur argent.
Retire les bijoux clinquants du tour de cou des gens.
À quoi bon jouer ? Peu importe perdre ou gagner. À quoi bon jouer ? Garder son argent, garder tout en l’état,
posé. Immobile.
Il a pris ma bouche, l’a ceinturée, vingt minutes après la prise. Il a passé au-dessus de mes paroles son filet transparent, et gluant qui m’électrise.
Policier du corps, il fait la patrouille : il tient mes positions et mes rêves au garde-à-vous, les mots ne partent plus se cogner contre ses boucliers brillants ; la place est vide, plus rien ne brûle, et le docteur blanc répartit les cendres grises de chaque côté de mon désert, propre, étincelant.
J’attends la mer, et ses eaux pleines et chargées.
J’espère la mer, salée. Elle seule pourra me faire déborder, et couler leurs camions rouges, leurs camions blancs.
En attendant, surveillée, je retiens mes reflets.
Dans les données après commercialisation, des symptômes extrapyramidaux réversibles ont été observés chez le nouveau-né après administration de Rispéridone au cours du dernier trimestre de la grossesse.

Après sa mise sur le marché l’enfant s’arrête aux pyramides pour son éternité.

Ne pas ouvrir la plaquette thermoformée avant administration, car il pourrait s’échapper.
Ouvrir la plaquette thermoformée pour voir le comprimé, afin de s’assurer qu’il existe vraiment.
Ne pas pousser le comprimé à travers le film de la plaquette thermoformée, car il pourrait se casser, brisé contre l’éternité de votre délire.
Retirer le comprimé de la plaquette thermoformée avec des mains sèches, car l’eau pourrait le faire grandir.
Placer le comprimé immédiatement sur la langue, ne jamais attendre.
Le comprimé se désintègre en quelques secondes, il se perd dans l’immensité de votre bouche.
De l’eau peut être utilisée si nécessaire, mais lui laisser de l’air : ce comprimé respire.

P.

Poésie

Au regard de notre époque
sécuritaire en tout
et pas seulement là où se portent nos luttes
mais aussi entre nous…

On a pas le temps de reprendre leurs dictionnaires
pour voir si on y comprend quelque chose !

Pour pas que le délire du monde réel
écrabouille tous les autres

Donnons des ailes à nos délires

Ne pas se laisser enfermer dans les définitions

et pétons les plombs de tous côtés !

Ce monde

clos à force d’être normé
malade à force d’être médical
froid à force d’être rationnel

Ce monde-là n’a que trop duré !

Tayo, camarade !
Lançons la horde des délirants à l’assaut de la citadelle de la raison !

Et brûlons définitivement le marché des étiquettes
y compris dans nos têtes

A.

Une maladie nommée schizophrénie

Capture d’écran 2014-05-29 à 00.57.08Une maladie nommée schizophrénie
Elle a atteint ma vie
Et elle me détruit
Je ne sais pas quoi pour m’accrocher
Et surtout pour ne plus me mutiler
J’aimerais pouvoir m’aider
Mais dans ma tête tout est bloqué
J’ai peur d’être abandonnée
Une fois de comme lycée
Je buvais de l’alcool tous les matins
Et ce n’était pas pour rien
Alors je me suis sortie hors du monde
Parce que je ne voulais pas entrer dans la ronde
Où il y a tant de peines, de haine
Mais aussi de la joie
Aussi belle qu’une peinture sur soie
Je peux dire que j’ai de la chance
Car pour certaines personnes la vie se joue sur une balance
Même si je ne l’ai pas choisie
J’ai de la chance d’être en vie
Et de plus j’ai envie de m’en sortir
Pour un plus bel avenir
Tous les soucis que j’ai maintenant disparaîtront
Avec le temps avec des efforts j’y crois à fond

J.

Se faire diagnostiquer

chuteJ’ai un diagnostic
Il me suit partout
Il me colle à la peau
Je ne suis plus n’importe qui
Je suis malade
Je n’ai plus de questions
J’ai des phases
Je n’ai plus de réponses
J’ai des crises
Je n’ai plus d’actes
J’ai des symptômes
Je n’ai plus de nerfs
J’ai un traitement
Je ne suis plus moi-même
Je suis diagnostiquée

A.

 

Effondrements

Un glissement de sens
Emportant avec lui
Des monceaux entiers
De raison

Des certitudes s’affaissent
Des identités s’effondrent

Des wagons d’évidences
Abolis d’un coup de hasard

Des montagnes d’habitudes
Dispersée par une brise

Toute la fatigue d’un jour
Balayé d’un soupir

Ton corps
Redevient
L’espace

A.

La folie

Pourquoi doit‐on enfermer la folie.
Et pourquoi que les médecins donnent des médicaments.
Mais c’est pour avoir la paix.
Pourquoi doit‐on cacher la folie.
Et pourquoi ils ne peuvent pas vivre comme tous les autres.
Car on préfère les ignorer.
Moi je trouve que ils ont le droit de vivre comme toutes les femmes et tous les hommes dans ce monde.
Car pour moi il n’y a pas de folie.
La folie ça n’existe pas.
C’est mieux de les mettre dans des hôpitaux psychiatriques que de les soigner.
Pour moi c’est les médecins qu’on doit les enfermer.

Philippe Smedts.
La Devinière, Belgique.

Plus fou que le fou

plusfouquelefouJe sais que le docteur ne sait pas que je sais.

Il ne sait pas que je sais ce qui est bon pour moi.

Mais le docteur croit savoir que je ne sais pas.

Il croit savoir, lui, ce qui est bon pour moi.

Alors qu’il n’en sait rien et continue de faire semblant de savoir !

Le docteur ne sait même pas ce qui est bon pour lui et il prétend savoir ce qui serait bon pour autrui.

Je sais que ce que le docteur me prescrit n’est pas mon remède

C’est le sien : il voudrait que je sois comme lui a envie que je sois et s’en Fout de savoir comment j’ai besoin d’être.

Mais moi je sais comment j’ai besoin d’être :

libre et sans ordonnance.

A.